
Aujourd’hui je veux vous parler d’un artiste. Une véritable source d’inspiration. Neil Gaiman, est un auteur britannique de romans et de bande dessinée. Il a écrit Coraline, un conte noir pour enfants. Mais aussi Sandman, la bande dessinée et Doctor Who, la série de science-fiction (disponible sur Netflix – pour les intéressés), dont il est le scénariste.
Pour ceux qui ne comprennent pas l’anglais, je voulais partager ses conseils et ce discours qu’il a donné, lors d’une cérémonie de remise de diplôme.
Le sujet de ce discours – trois petits mots affichés sur mon tableau :
MAKE GOOD ART
Plusieurs alternatives possibles en français, qui donneraient :
FAITES DE BELLES CHOSES – Faites une (bonne) Oeuvre d’Art
CRÉEZ QUELQUE CHOSE DE BIEN, DE BEAU, DE BON
Voici des extraits ainsi que mes citations favorites de son discours:
Neil est un homme qu’on pourrait appeler ordinaire. À l’exception de son parcours car il semble qu’il n’ait jamais vraiment aimé l’école. Il n’a pas obtenu de diplôme non plus. Un exemple pour tous ceux qui restent persuadés que créer ou faire quelque chose implique forcément une autorisation ou une compétence.
“I never really expected to find myself giving advice to people graduating from an establishment of higher education. I never graduated from any such establishment. I never even started at one. I escaped from school as soon as I could…”
« Je n’avais jamais imaginé me trouver en train de donner des conseils à de jeunes diplômés de l’enseignement supérieur. Je n’ai jamais été diplômé, par un tel établissement. Je n’y suis même jamais entré. J’ai échappé l’école aussi tôt que j’ai pu… »
“I got out into the world, I wrote, and I became a better writer the more I wrote, and I wrote some more, and nobody ever seemed to mind that I was making it up as I went along, they just read what I wrote and they paid for it, or they didn’t…”
« Je suis sortie, j’ai écrit, et plus j’écrivais, meilleur écrivain je devenais, donc j’ai continué à écrire davantage, et personne ne semblait être dérangé par le fait que j’avais tout inventé, tout le long, ils lisaient ce que j’écrivais et ils me payaient pour cela, ou pas… »
Il a cette image de lui même en tant qu’écrivain, dès le début. Au lieu de se faire un plan de carrière, il a décidé de faire une liste de tout ce qu’il souhaitait faire et réaliser dans cette vie.
“Looking back, I’ve had a remarkable ride. I’m not sure I can call it a career, because a career implies that I had some kind of career plan, and I never did. The nearest thing I had was a list I made when I was 15 of everything I wanted to do: to write an adult novel, a children’s book, a comic, a movie, record an audiobook, write an episode of Doctor Who… and so on. I didn’t have a career. I just did the next thing on the list.”
« Avec le recul, j’ai fait un voyage remarquable. Je ne suis pas sûr de pouvoir appeler cela une carrière, parce qu’une carrière implique que j’avais une sorte de “plan de carrière”, et je n’en ai jamais eu. La chose la plus proche que j’ai pu faire (quand j’avais 15 ans), c’était une liste de tout ce que je voulais faire: écrire un roman pour adulte, un livre pour enfants, une bande dessinée, un film, enregistrer un livre audio, écrire un épisode de Doctor Who… et j’en passe. Je n’avais pas de carrière. Je faisais juste la chose suivante sur la liste ».
C’est ainsi qu’il débute son discours, en donnant des conseils qu’il a pu tirer de sa propre expérience d’auteur et d’écran. Avec des débuts difficiles et en dépassant les règles du jeu, qui nous sont parfois imposées.
Son Tout Premier Conseil :
“When you start out on a career in the arts you have no idea what you are doing.”
« Lorsque vous débutez une carrière artistique, vous n’avez aucune idée de ce que vous faites ».
“If you don’t know it’s impossible it’s easier to do. And because nobody’s done it before, they haven’t made up rules to stop anyone doing that again, yet.”
« Si vous ne savez pas que c’est impossible, c’est plus facile à faire. Et parce que personne ne l’a déjà fait, ils n’ont pas créé de règles pour empêcher ou arrêter quiconque à le faire de nouveau – pour le moment ».
Conseil numéro 2, dans lequel il partage le pouvoir de la visualisation et la volonté de réaliser sa propre « mission de vie » (purpose, en anglais).
“If you have an idea of what you want to make, what you were put here to do, then just go and do that.”
« Si vous avez une idée de ce que vous voulez faire, de ce pourquoi vous êtes ici, alors allez-y et faites-le ».
“Something that worked for me was imagining that where I wanted to be – an author, primarily of fiction, making good books, making good comics and supporting myself through my words – was a mountain. A distant mountain. My goal.”
« Quelque chose qui a fonctionné pour moi était d’imaginer où je voulais être – un auteur, principalement de fiction, écrivant de bons livres, créant de bonnes bandes dessinées, de bons films et de subvenir à mes besoins grâce à mes mots – en imaginant que c’était une montagne. Une montagne distante. Mon objectif ».
« And I knew that as long as I kept walking towards the mountain I would be all right. »
« Et je savais que tant que je continuerais à marcher vers la montagne, tout irait bien ».
“I learned to write by writing. I tended to do anything as long as it felt like an adventure, and to stop when it felt like work, which meant that life did not feel like work.”
« J’ai appris à écrire en écrivant. J’avais tendance à faire tout ce qui ressemblait à une aventure et à m’arrêter quand ça ressemblait à un travail, ce qui veut dire que ma vie ne ressemblait pas à un travail. »
Conseil numéro 3 :
“When you start off, you have to deal with the problems of failure.You need to be thick-skinned, to learn that not every project will survive. A freelance life, a life in the arts, is sometimes like putting messages in bottles, on a desert island, and hoping that someone will find one of your bottles and open it and read it.”
« Lorsque on débute, on doit gérer les problèmes de l’échec. Vous devez être blindé, pour apprendre que tous les projets ne peuvent pas survivre. Une vie en tant que freelance (indépendant), une vie d’artiste, c’est parfois comme jeter des bouteilles à la mer, depuis une île déserte, et espérer que quelqu’un trouvera l’une de vos bouteilles, l’ouvrira, et lira votre message ».
Conseil numéro 4 :
“I hope you’ll make mistakes. If you’re making mistakes, it means you’re out there doing something. And the mistakes in themselves can be useful…”
« J’espère que vous ferez des erreurs. Si vous vous trompez, ça veut dire que vous êtes dehors en train de faire quelque chose. Et les erreurs, en soi, peuvent être très utiles… »
“Make good art. I’m serious. Husband runs off with a politician? Make good art. Leg crushed and then eaten by mutated boa constrictor? Make good art. IRS on your trail? Make good art. Cat exploded? Make good art. Somebody on the Internet thinks what you do is stupid or evil or it’s all been done before? Make good art. Probably things will work out somehow, and eventually time will take the sting away, but that doesn’t matter. Do what only you do best. Make good art.”
« Je suis sérieux. Votre mari s’enfuit avec un homme politique? Faites une oeuvre d’art. Votre jambe est écrasée puis dévorée par un boa constrictor mutant? Faites une oeuvre d’art. Le fisc est sur vos traces? Faites de belles choses. Le chat a explosé? Faites une oeuvre d’art. Quelqu’un sur internet pense que vos créations sont stupides, ou malsaines, ou du déjà vues? Faites une oeuvre d’art. Les choses vont probablement s’arranger, le temps viendra dissiper la douleur, et cela n’a pas d’importance. Faites ce que vous seul savez faire de mieux. Faites une oeuvre d’art ».
Conseil numéro 5 :
“Do the stuff that only you can do.”
« Faites ce que vous seul pouvez faire ».
“Most of us only find our own voices after we’ve sounded like a lot of other people. But the one thing that you have that nobody else has is you. Your voice, your mind, your story, your vision. So write and draw and build and play and dance and live as only you can.”
« La plupart d’entre nous ne trouvons notre propre voix qu’après avoir ressemblé à beaucoup d’autres personnes. Mais une chose que vous avez, que personne d’autre n’a, c’est Vous: votre voix, votre esprit, votre histoire, votre vision. Alors écrivez et dessinez et construisez et jouez et dansez et vivez comme vous seul le pouvez ».
Conseil numéro 6 :
“People get hired because, somehow, they get hired. In my case I did something which these days would be easy to check, and would get me into trouble, and when I started out, in those pre-internet days, seemed like a sensible career strategy: when I was asked by editors who I’d worked for, I lied. I listed a handful of magazines that sounded likely, and I sounded confident, and I got jobs. I then made it a point of honour to have written something for each of the magazines I’d listed to get that first job, so that I hadn’t actually lied, I’d just been chronologically challenged… You get work however you get work.”
« Les gens sont embauchés parce que, d’une façon ou d’une autre, ils sont embauchés. Dans mon cas, j’ai fait quelque chose qui, aujourd’hui, serait très simple à vérifier, et qui m’attirerait beaucoup d’ennuis. Lorsque j’ai débuté (avant l’arrivée d’internet), ça semblait un choix de carrière raisonnable: lorsque des éditeurs me demandaient pour qui j’avais travaillé, j’ai menti. J’ai listé une poignée de magazines crédibles, j’avais l’air confiant, et j’ai eu le job. Par la suite, j’ai mis un point d’honneur à écrire quelque chose pour chacun des magazines que j’avais cité pour obtenir ce premier job. Donc je n’ai pas vraiment menti, j’ai juste été chronologiquement défié… Vous trouvez du travail, comme vous le pouvez ».
Voici le grand conseil, non suivi, que lui a donné, à l’époque, l’auteur prolifique Stephen King :
“This is really great. You should enjoy it.”
« C’est vraiment bien. Tu devrais en profiter ».
“And I didn’t. Best advice I got that I ignored. Instead I worried about it. I worried about the next deadline, the next idea, the next story.”
« Et je ne l’ai pas fait. Le meilleur conseil qu’on m’ait donné, je l’ai ignoré. À la place, je me suis inquiété. Je m’inquiétais de la prochaine deadline (date butoir), de la prochaine idée, de la prochaine histoire ».
“That was the hardest lesson for me, I think: to let go and enjoy the ride, because the ride takes you to some remarkable and unexpected places.”
« Pour moi, ce fut la leçon la plus difficile: lâcher-prise et profiter du voyage, parce que le voyage vous emmène dans des endroits remarquables et inattendus ».
Ce discours nous donne l’envie d’avancer et de se mettre à l’action. Tout simplement par le simple acte considéré ici comme courageux : créer quelque chose.
Je pense que cette leçon, ne se limite pas à l’art. Je la considère comme une véritable leçon de vie. Nous sommes tous invités à initier cette dernière, dans nos vies respectives à notre rythme et à notre hauteur.
Je terminerai avec cette citation :
“So be wise, because the world needs more wisdom, and if you cannot be wise, pretend to be someone who is wise, and then just behave like they would.
And now go, and make interesting mistakes, make amazing mistakes, make glorious and fantastic mistakes. Break rules…”
« Alors, soyez sages, parce que le monde a besoin de votre sagesse, et si vous ne pouvez pas être sage, prétendez être quelqu’un de sage, et comportez-vous juste comme il le ferait. Maintenant allez-y, et faites des erreurs intéressantes, faites des erreurs incroyables, faites des erreurs glorieuses et fantastiques. Brisez les règles… »
La vidéo originale : https://www.youtube.com/watch?v=ikAb-NYkseI
Sources à consulter, pour les anglophones:
– Le livre édité par Neil Gaiman à la suite de ce discours “Make Good Art” – disponible sur Amazon.
– Site de l’Université en question, où le discours inaugural a été donné en 2012 (vidéo disponible en haut de page).